Eva
Holy Sword
Messages : 93 Date d'inscription : 04/02/2014
| Sujet: Tombe. ─ Apotheosis Mar 3 Fév - 14:37 | |
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Combien de temps avait passé ? Des jours ? Des semaines ? Des mois, sûrement. Plus jamais tes yeux ne se posaient sur le calendrier, plus jamais tu ne faisais attention à l'heure à laquelle tu allais dormir, plus jamais tu ne vérifiais s'il restait à manger dans le frigo. Tu n'étais rien. Plus rien. Juste un chien, perdu, laissé dehors sous la pluie sans même un carton. Tu n'avais pas besoin de lui. Tu n'avais pas besoin de sa protection, pas besoin de te sentir mieux, pas besoin de te relever, de récupérer de tes plaies. Tu aurais du mourir. Alors pourquoi tenais-tu tant à rester en vie ? Tu vagabondes, tournes en rond dans ton nouvel appartement, plus miteux que jamais. Sans chauffage, sans isolation, tu mourrais de froid malgré les couvertures et les écharpes, tu gelais sur place malgré le café au matin et le thé brûlant au soir. Tes yeux devenaient chaque jour un peu plus vides et tes paupières chaque fois plus fatiguées. Tu étais perdue. Qui était-il ? Qui avait-il été ? Avait-il été tout court ? Tu sens l'amertume te brûler la gorge et le temps t'arracher la peau.
C'est pourquoi tu étais sortie. C'est pourquoi tu errais, à la recherche d'une quelconque trace, un quelconque signe de vie de sa part. Comme si tu voulais vérifier, comme si tu voulais savoir ce qu'il était devenu.. Ou ce que tu avais été trop aveuglée pour voir. Le casino, son domicile, le casino, son domicile. S'était-il fondu à l'ombre, une fois encore ?
Un bon coup de maquillage sur la peau, sur les bleus qui refusaient de partir, du crayon et du mascara. Tu te donnes une valeur, une brillance. Tu tentes de te donner une constance, pour ne pas t'étouffer à travers la foule, pour pouvoir en ressortir, ne pas t'y mêler mais en être. Des talons et des bas, porte-jarretelle et robe de soirée, tu t'y apparente mais jamais ne t'y efface. En noir, en rouge, les couleurs te forment et te lissent. Tu entres. Du regard tu cherches sa silhouette mais ne vois autour des machines et des tables qu'une bande de saouls et de pauvres, espérant avec leur dernier salaire obtenir plus. Toujours plus. Tu plisses les yeux. Un homme te demande le jeu auquel tu joues. Les seules fois où tu avais joué, c'était autour d'une table avec du Coca et des chips, avec ceux que tu avais considéré comme tes amis, une bonne partie de ton adolescence. Tu réfléchis. Monsieur était un menteur.
« Poker. »
Il t'indique le chemin et t'accompagne un moment, te laissant à proximité des tables. Tu papillonne des yeux quelques secondes avant de le repérer. Tu t'avances, lentement, calmement. Tu t'installes entre deux hommes. L'un d'eux n'avait pas manqué de te détailler. L'autre semblait trop occupé par ce qu'il y avait dans ses poches. Ton regard ne se fixe pas sur Monsieur, il détaille chacun des participants à la table. Aucun d'eux n'avait sa carrure, aucun d'eux n'avait sa prestance.. Mais chacun d'eux avait l'air aussi malsain que lui. Un maigre sourire brise ta présence silencieuse, avant que tu relèves enfin le regard vers lui. Tu les salues, brièvement, d'un mouvement de menton.
« Messieurs. »
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