Une expression blasée sur mon visage, l'envie n'y est pas. Malgré tout je dois raconter ce qui s'est passé... Pour pouvoir entamer mon travail de deuil soi-disant. Très bien.

La Suisse, pays mère du chocolat ainsi que des vaches violettes et blanches. Idyllique non ? Détrompez-vous, ici si vous n'êtes pas riches, vous êtes foutus. 3% de chômage ça fait rêver mais du jour au lendemain vous pouvez être dégagé de l'entreprise dans laquelle vous bossez.

C'est ici que je suis née, plus précisément à Genève. L'un des quatre quantons français de la Suisse, cependant il m'arrive fréquemment de parler l'allemand. Ma vie n'est ni belle ni terrible, juste normal à quelques exceptions prêtes... Je vis avec ma mère qui joint relativement bien les deux bouts.
Quant à mon père, c'est disons compliqué. J'ignore par combien de femmes il est passé mais en tout cas, je suis sûre de n'être que son énième enfant sur une liste qui est loin de cesser. Cet homme qu'est mon géniteur, aux premiers abords il est beau. Le genre qui vous fait retourner toute la gente féminine dans la rue.

Un profiteur. L'homme est l'élève du diable.

« Papa, je suis rentrée ! Regarde j'ai eu la meilleure note de la classe ! »

Il s'en fout, trop occupé à pianoter sur le clavier de son téléphone portable, sans doute encore une de ces fameuses copines. Son attitude me donne envie de lui en coller une mais je ne peux pas. Au lieu de ça, je décide de poser mon sac et de retirer mes chaussures, je prends un peu d'élan et ... J'ai pris de l'élan afin de sauter sur lui pour m'amuser, son appareil est tombé au sol, je lui souris comme une idiote finie mais lui s'énerve.

« Dégage petite conne ! J'ai d'autres choses à foutre que de m'occuper d'un pot de colle ! Ces gosses, je vous jure ! »

Personne ne fait attention à moi. Ma mère est trop occupée par son travail, mon père en a rien à faire de sa gamine. Comment vais-je me construire si eux-mêmes ne m'apportent pas la reconnaissance dont j'ai besoin ? Je ne suis rien dans ce cas là.

Les mois s'écoulent lentement comme le tic-tac d'une horloge, la vie est toujours la même. Mes camarades m'envient d'avoir une mère qui se donne à fond pour son enfant mais moi ça ne me satisfait pas.
La situation est en train de se désagréger dans mon univers "familial", mon père ne va pas tarder à claquer la porte. Il s'absente de plus en plus souvent, ma mère s'enferme encore plus longtemps dans son bureau.

Je marque une courte pause dans laquelle l'homme en face de moi me tend un verre d'eau pour me réhydrater. Et mon récit continue.

Il n'y a pas eu de violence. Juste des disputes incessantes, la femme dévorée par son boulot a refusé que son compagnon la quitte. Il a fait le coup à plusieurs autres. Un récidiviste.

Ma mère a abandonné la garde, mon père ne m'a jamais reconnue comme étant sa fille. On m'a ballotté en famille d'accueil, je ne suis plus qu'une enfant de l'État.

Celle qui m'a mise au monde a mis un terme à sa vie, voilà pourquoi je suis ici à ressasser ce qu'on appelle mes souvenirs. Devant un policier qui pue la transpiration, qui joue au gentil. Sale hypocrite.

Ils se sont inquiétés pour moi, comment le prendrais-je ? Dès l'instant où on me l'a annoncé, j'ai pu faire le deuil de ma première vie de famille ratée et de ma mère biologique. Ça ne pouvait que se terminer comme ça, je n'ai pas pleuré même si la situation ne m'a pas laissé de marbre.
Je peux enfin rentrer chez moi, mes parents adoptifs m'attendent. Dans trois jours, c'est mon anniversaire. Je vais sur mes seize ans.

Le casque et tout le matériel qui va avec, je l'ai eu de mes parents lorsque j'ai enfin eu mes seize piges. C'est un voisin qui apparemment l'a donné à ma mère, ce type a jugé bon que son fils ne va pas devenir plus abruti qui ne l'est déjà avec tous ces jeux.
Tant pis pour ce gamin, je vais en profiter à sa place.

Je branche le tout, j'ai quand même une drôle d'appréhension avant de jouer. Hm... Sans doute mon sixième sens qui me joue des tours. Je l'enfile et active le jeu.

Hein ?! Fut ma première réaction. C'est vraiment grandeur nature tout ça, je suis vraiment surprise. Ça me fait penser à Animal Crossing, je suis devant la mairie. J'entre à l'intérieur - avec comme idée de voir un canard comme réceptionniste - mais au lieu de ça c'est un avatar à apparence humaine qui m'accueille.

- Bienvenue sur Euphemia. Choisissez votre pseudo, votre île, votre pouvoir et votre métier.

Je consulte les choix de pouvoirs ainsi que les îles, le serveur conseille plus d'autres pouvoirs mais bon... J'ai déjà choisi.

- Mon pseudo sera Hoshi. Crimson District comme île, je veux comme pouvoir de posséder un corps infatigable et enfin je choisis d'être secrétaire. Y a t'il un médecin ou autre ici ?

- Une psychologue, mademoiselle.

- Bien, je serai la secrétaire de la psy alors.

C'est ainsi que commence ma partie, j'ignore encore qu'on ne peut pas se déconnecter d'ici.