Avast avait de la chance de ne pas être au bout des menottes : parce que tous les scrupules que Casus aurait pu avoir à approfondir les gestes qui lui avaient valu un violent aller-retour dans l'estomac s'étaient évaporés depuis qu'elle avait lâchement menacé de l’émasculer. Quitte à perdre le pari parce qu'on était un homme, autant aller jusqu'au bout et montrer que tant qu'à faire, on ne pensait aussi qu'avec ça et que la morale, on s'en battait les c... sans mauvais jeux de mots. Bénie sois la jugeote de la policière pour ne pas lui avoir laissé la moindre marge de manœuvre une fois sa gorge libérée. Sur le coup, il était tellement énervé qu'il aurait pu le faire. Le politiquement correct ne l'étouffait pas et comme Avast avait l'air de se foutre royalement d'où elle posait ses mains, il ne voyait pas pourquoi lui aurait dû s'en préoccuper et s'en excuser. La prochaine fois qu'il la croisait les mains vides, il irait droit au but : nice handcuffs, wanna bang ?
Rayez l'interrogation ; il ne comptait pas lui demander son avis.

Le jeune homme se mordit la langue sur une tendre insulte à propos de sa tortionnaire et soutint son regard à défaut de la noyer de compliments distingués. Oh ça oui, Casus aimait provoquer : et même à une longueur de menottes de la défaite, il s'acharnait à ne rien vouloir lui concéder. Tout ce qu'Avast aurait, c'était la fierté d'avoir compris que les hommes avaient tous un point faible, sans exception, et que taper dessus réduisait généralement l'interlocuteur à quia. Tant qu'à faire, elle aurait au moins pu rendre la situation plus intéressante. Où était le défi pour elle, dans tout ça ?
Vise mieux, la prochaine fois.

Il laissa ses lèvres esquisser une moue éloquente sans avoir le temps ni l'envie d'en rajouter plus. Si, aucun doute là-dessus, c'était tout à fait son trip de se faire grimper dessus par une folle furieuse en petite tenue et aux mains baladeuses. Pas besoin de lui dire qu'il aurait aussi bien aimé utiliser les siennes, de mains, hein ? Ni qu'il savait en faire des choses, avec, autres que balancer des pavés et des bombes à tout va. Ça, elle avait sûrement pas envie de le savoir.
Et lorsqu'elle le relâcha, il ne chercha pas à se débattre. Game over, c'était fini pour lui ; et si la colère lui donnait envie de filer des coups de boule aux ahuris qui venaient de débarquer comme le messie au milieu d'un champ de mines, la perspective d'une vengeance l'empêchait de serrer trop fort les poings et les dents. Il mima le son qui allait avec le doigt tendu de la jeune femme, le corps encore douloureux de tous les coups reçus. Peut-être que personne ne lui avait appris à ne pas crier victoire trop tôt, qu'elle se pensait à l'abri une fois le méchant terroriste derrière les barreaux. Sauf qu'elle ne l'avait pas tué, qu'elle n'avait pas vendu sa peau, et que les barreaux n'étaient que des barreaux : jusqu'à ce qu'il l'ait clouée au sol, elle restait son ennemie numéro un.

Mal à propos, il se souvint du son fugace de son nom contre sa langue et tressaillit. Si elle tenait tant que ça à jouer, il allait lui donner de quoi s'en mordre les doigts. Il ne voulait pas être la souris pour plus d'un round.
Et même s'il ne la voyait plus, ce fut à elle que s'adressa son sourire, qui aurait tout aussi bien pu prendre la forme d'un majeur levé.

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