Ta langue passe machinalement sur tes lèvres alors que tu ajustes tes gants. Pardon, simplement ? Chaque larme coulant de ses yeux augmente cette sensation étrange qui prend peu a peu place en ton être. Tu finis par te retourner quelques secondes pour ranger un verre, puis reporte ton attention sur la demoiselle qui semble boire doucement son diabolo.

Elle fait partie des habitués du bar. Tu le sais, dès qu'elle passe la porte, tu lui prépares son diabolo menthe. Elle est de ceux dont tu te souviens assez facilement. Vous n'avez échangé que peu de parole depuis le temps que tu la vois passer le seuil de la porte du bar, mais tu ne vois pas rester là, à la regarder pleurer devant son verre, en l'ignorant. Ta main gantée vient doucement se poser au niveau de son poignet, et un sourire s'étire doucement sur tes lèvres.

- Si tu as besoin, n'hésite pas.

Ce n'est pas une période de pointe. Loin de là même. Alors oui, tu es seul en ce moment pour servir. Et comme toujours, lorsque tu as besoin d'un peu de temps, c'est a ce moment que les chieurs rappliquent et te demande. Tu détournes le regard, échappant un soupir.

- Excuse-moi trente secondes.

Il s'indigne. Son café lui coute a peine plus cher, et c'est la fin du monde. Tu le fixes, peu aimable, lui expliquant qu'un « S'il vous plait » ne lui aurait pas arraché la langue. Tu sembles l'avoir contrarié, mais en y pensant mieux, tu as juste envie de lui en décoller une. Tu accèdes à la demande de la demoiselle. Mal à l'aise. La distance que met le comptoir entre les clients et toi n'est plus alors que tu es à côté d'elle. Tu tires nerveusement sur tes gants; Elle n'a pas besoin de ce genre d'envie, de situation gênante.

- Les autres attendront. Je suis tout à toi.

Un sourire a de nouveau pris place sur tes lèvres. Tu te veux rassurant, tu aimerais pouvoir la voir moins triste, moins grise. Tu te prends un moment pour t'occuper d'elle, oubliant les clients qui risquent de t'appeler plus tard. Tu n'ajoutes rien, tu te contentes d'être présent à côté d'elle. Tu lui laisses le temps, tu ne la forces pas. Si elle souhaite parler, elle le fera d'elle-même.

Tu l'écoutes attentivement. Un ami qu'elle ne voit plus, et ça l'inquiète. Elle doit vraiment y tenir, à cet ami pour se mettre dans un tel état. Tes dents se ferment doucement sur l'intérieur de ta joue, tu n'aimes pas voir des larmes sur un joli visage. Elle reprend avec cette même voix, cette même intonation qui te donne envie de lui rendre le sourire.

- Je ne suis certainement pas la bonne personne pour te conseiller mais, si tu ne vois pas ce que tu as pu faire de travers, alors peut-être que ça ne vient pas de toi. Tu devrais essayer de l'appeler, sans non plus le harceler, et tenter de lui en parler ?

Tu lui adresses de nouveau ce sourire rassurant, tentant de lui faire comprendre qu'elle peut se lâcher, se détendre, et prendre le temps qu'il lui faut pour se remettre un peu sur pieds. Honnêtement, même toi il t'es arrivé d'avoir des coup de blues, le cafard, et tu avais été heureux de pouvoir te reposer ne serait-ce qu'un minimum sur quelqu'un. Tu la fixes toujours, te demandant depuis combien de temps cet état traîne en elle, depuis combien de temps n'allait-elle plus bien ? Même en la voyant quotidiennement dans le bar, tu n'avais jamais noté un quelconque changement. C'était habituel. Ta langue passe doucement sur tes lèvres alors que tu ajustes tes gants, un nouvelle fois.

- Tu n'es pas inutile. T'sais, chaque personne présente, même sur Euphemia, est ici pour une bonne raison, non ? Tu as ta place, il faut simplement que tu la trouves. Et puis, s'ils ne te donnent rien à faire, peut-être que c'est aussi la crise in game !

Pour toi, c'est certain que tu vas essayer de faire en sorte qu'elle reparte seulement après avoir retrouvé le sourire. Tu n'es pas doué pour ça, mais l'écouter lui fera peut-être du bien.

Injoignable, n'est-ce pas. Tu t'y attendais un peu. S'inquiéter alors qu'on a pas essayer de joindre la personne qui nous inquiète, c'est futile. Et ce n'est pas ce qu'elle est, ce n'est pas ce qu'elle dégage. Et tu l'écoutes réduire en pièces le peu que tu avais réussi à formuler pour essayer de lui remonter le moral. Ce n'est pas chose aisé pour toi, vraiment. Tu as beau avoir passer un nombre incalculable d'heure sur le sofa d'un psychologue, tu n'en as pas pour autant tirer les astuces du métier. Tu te figes un instant suite à son changement de sujet. C'est à toi de t'occuper de son moral, pas à elle de s'inquiéter de tes problèmes. Tu esquisse tout de même un sourire, gêné.

- Ce n'est pas une règle d'un serveur, c'est simplement une manie, une habitude.

Lui balancer que, oui c'est grave s'ils tombent ? Même si elle te le demande, tu ne les enlèveras pas. C'est un règle incontournable. Ta règle. Et machinalement, tu tires à nouveau dessus. Tu finis par joindre tes mains devant toi, détournant légèrement le regard. Tu as changé, tu n'es plus celui que tu étais autrefois. Tu es plus mâture, plus réfléchit. Et souvent, très souvent, tu regrettes de ne pas avoir mieux réfléchit par le passé. Choisir le court terme, pour finalement en baver sur le long terme, ce n'était pas quelque chose qui te préoccupait. C'était même l'inverse. Profiter tout de suite, maintenant. Et ne pas penser à demain. Ta langue passe sur tes lèvres que tu trouves trop sèches.

- J'ai moi-même quelques secrets. Comme tous le monde.

Elle semble sceptique. Es-tu un si mauvais menteur, Ely ? Apparemment. Elle hausse un sourcil te question. Et tu sens son regard aller de tes gants jusqu'à ton visage. Tu lâche simplement un soupir. Pourvu qu'elle ne fasse une connerie, qu'elle ne soit pas trop curieuse. Mais ce n'était pas compter sur le fait que c'est une fille. Tu sursautes lorsqu'un de tes gants glisse, laissant la peau de ta main à découvert. Elle la regarde, une expression de surprise sur le visage.

- Seulement une manie.

Tu penses avoir été le plus convainquant possible, avec ces simples mots pour affirmer sa question. Tu sursautes à nouveau lorsque tu sens ses doigts se poser sur ta peau. Tu la regardes, tu la fixes, alors que tu lâche un soupir. La curiosité de cette demoiselle t'impressionne, vraiment. Tu échappes à nouveau un soupir lorsqu'elle reprend ses mains vers elle, et tu passes ta langue sur tes lèvres. Machinalement. Tu ne dis rien, la laissant se calmer. Tu souris doucement. Ses joues rosies la rende mignonne.

- La curiosité est un vilain défaut, tu sais ?

Et toi, Ely, tu es complètement stupide. La voir ainsi, rougir, le coeur s'affolant t'a rappelé tes débuts sur Euphemia. Cet amusement que tu avais à profiter de ce don, à en rire, à en tirer du plaisir. Tu tends ta main dégantée pour prendre le verre de la blonde, effleure doucement sa peau avant de tirer le verre vers toi et de boire une gorgée. Et dire qu'il n'y a même pas cinq minutes tu essayais de lui remonter le moral. Et là, ça te saute aux yeux. Tu n'es pas doué pour ça. Du moins, tu ne remontes pas le moral. Tu fais oublier les points noirs par d'autre moyens. Ta langue repasse lentement sur tes lèvres, alors que tu repousses le verre vers elle, et que tu la fixes en souriant.

Tu la fixes toujours en souriant. Est-ce vraiment une bonne idée ce que tu vas faire ? Vraiment pas. C'est certainement la pire connerie que tu vas faire depuis que tu as décidé d'être moins con. Mais la voir comme ça, ses joues rosies à cause de ton contact. Tu as juste envie d'oublier d'être un gentleman, d'être sage. Tu te souviens de ces nuits passées auparavant, de ce que ça t'as toujours procuré, jusqu'à ce que tu t'en lasses. Mais une dernière fois ? Juste pour te souvenir, ce n'est pas grave n'est-ce pas ? Tes lèvres passent à nouveau sur tes lèvres, alors que tu entends sa respiration. Jusqu'à ce qu'elle te lâche. Tu ramène doucement ta main vers toi, alors qu'elle semble gênée. Elle détourne le regard.

- C'est toi qui l'a enlevé. Tu ne veux pas le remettre ?

Tu es stupide. Tu n'as pas honte. Parce qu'au final, tu n'es doué que pour ça. Et puis, cette question à laquelle tu n'aimes pas te rappeler la réponse. Tes dents se serrent doucement sur ta lèvres, alors que tes doigts se mêlent. Point sensible : Shot.

- Parce que j'étais immature, et je le suis encore, mine de rien. Mais, est-ce tant gênant que ça ?

Stop. Arrête ça. Tu sens à nouveau sa peau sous tes doigts. Ils glissent lentement sur la joue rosie de la demoiselle, alors que tu souris, joueur. Tu la taquine, doucement. Ca en devient pratiquement un jeu. Tu t'amuses un peu, et elle, elle oublie un instant ses pensées noires. Ce n'est un bon compromis ? Vraiment pas, mais pourtant tu le fais. Ton pouce se balade lentement sur sa joue, avant de le ramener légèrement vers toi, rompant le contact.

- Ose me dire que tu n'aimes pas ça.

Tu te retournes quelques secondes pour adresser un sourire aux clients présents dans la salle, et leur adresse aussi un signe d'excuse de la main. Tu te décides à refaire face à la jolie blonde, et accède à sa demande. Tu attrapes ton gant et l'enfile. Une légère grimace apparait sur ton visage l'espace de quelques secondes. Sentir de nouveau le tissu fluide du gant recouvrir ta peau t'es désagréable.

Tu attrapes le verre avant de te lever pour passer de l'autre côté du comptoir. Tu poses le verre, prend appuis sur le comptoir avant de planter ton regard dans les iris de la demoiselle.

- Je te taquine seulement. Eh, refais moi voir comment tu souris ?

Tu esquisse un sourire joueur sur tes lèvres, et en attendant le sien tu attrape un verre pour te servir à boire à ton tour.

- Tu veux boire autre chose ? C'est moi qui offre.