Ambre vacillait face aux quelques dizaines de ses doubles virtuels qui avaient envahi les parois réfléchissantes qui l’entouraient. Pour peu qu’on soit assez satisfait de son physique, cette galerie avait de quoi rendre narcissique. En temps normal, Ambre n’avait pas grand-chose à redire sur sa propre apparence, mais aujourd’hui, elle avait foiré sa coiffure dans une tentative d’originalité, et voir cette catastrophe capillaire démultipliée par les miroirs la faisait presque frémir. Elle se résolut à annihiler la chose en retirant, de quelques gestes vifs et précis, les diverses épingles et élastiques qui avaient fait tenir l’édifice. Une fois ses cheveux libres, elle reprit sa progression tout en déroulant son fil, une expression plus déterminée que jamais ancrée sur son petit visage.

Ambre avait décidé qu’elle traverserait la galerie aux miroirs de la tour du ciel de Hope corporation et découvrirait les secrets qu’elle dissimulait. Et quand Ambre avait décidé quelque chose, elle s’y tenait, quitte à y consacrer le reste de son existence. Ce qu’elle était bien partie pour faire, à vrai dire, car la galerie se montrait fort peu coopérative.

Elle y était entrée une première fois, à l’aveuglette, histoire de se familiariser avec les lieux. Après une heure et demie de déambulations hasardeuses, elle s’était retrouvée à son point de départ, comme on le lui avait prédit.
La deuxième fois, Ambre avait fait preuve d’un peu plus de méthode, du moins le croyait-elle, en laissant au fur et à mesure de son passage des marques à coup de feutres effaçables sur les miroirs. Elle espérait ainsi ne pas revenir sur ses pas, et progresser lentement mais sûrement. Pourtant, deux heures plus tard, elle s’était retrouvée à l’entrée de la galerie sans avoir jamais recroisé le moindre de ses marquages. Avaient-ils été effacés au fur et à mesure ? La question avait longtemps turlupiné la rouquine…
La troisième fois, elle s’était munie de centaines d’autocollants colorés qu’elle apposait sur le sol à chacun de ses changements de directions. Le principe était le même qu’avec les marques, si ce n’est que les indices n’étaient pas posés sur les miroirs en eux-mêmes. Ambre soupçonnait en effet qu’ils soient porteurs d’une certaine technologie qui contribuerait à dérouter les promeneurs. Mais le résultat fût parfaitement identique. Retour à la case départ.

Pour son quatrième essai, Ambre s’était inspirée de la princesse Arianne, et avait déroulé derrière elle une longue pelote de fil de pêche très résistant. Si la galerie se débarrassait de ses marquages au fur et à mesure qu’elle les laissait, Ambre était curieuse de voir comment elle réussirait à contrecarrer cette méthode.
Elle progressait depuis environs trois-quarts d’heure lorsqu’elle entendit le premier cri. La rouquine se retourna si brusquement qu’elle faillit percuter un miroir. Elle fronça les sourcils et tendit l’oreille. Le second cri retentit, bien plus proche à ce qu’il lui semblait. Elle se dirigea instinctivement dans sa direction, mais ne put faire que quelques mètres avant que le fil ne lui glisse des mains, comme retenu par un obstacle. Ambre laissa échapper un juron. Elle était déjà arrivée au bout de la pelote. Elle hésita un peu. Mais la personne –une fille vraisemblablement- avait l’air de flipper sérieusement, et il serait fort peu correct de ne pas aller s’enquérir de la situation. Il lui suffisait de retenir les quelques directions qu’elle aurait à prendre pour rejoindre l’égarée, et revenir sur ses pas si tôt qu’elle l’aurait aidée. Un peu à regret, Ambre laissa le fil derrière elle et s’enfonça à nouveau dans les couloirs. Droite, gauche, droite, droite, gauche…

«  On peut savoir pourquoi tu brailles ? Si c’est parce que tu t’es perdue, c’est normal, c’est le but de ce traquenard figure-toi. »

Ambre avait découvert une jeune fille, probablement plus jeune qu’elle, dotée d’une chevelure d’un joli rouge et d’un visage envahi par la panique. Ses premières paroles avaient été plus dures que le ton sur lequel elle les avait prononcées. Après tout, elle pouvait concevoir qu’on se sente extrêmement mal à l’aise dans cet univers de glaces.

« Le truc, c’est de fixer le sol plutôt que les miroirs. Ça résout pas tout, mais ça aide quand-même à ne pas percuter un mur tous les trois pas »

Evidemment, c’était plus facile pour elle. Après tout, ça faisait déjà six bonnes heures qu’elle arpentait le dédale.

Spoiler:

La fille sembla reprendre contenance. Tant mieux, parce que Ambre n’était vraiment pas douée pour réconforter les gens.

« Je m'appelle Red, je te remercie d'être venue, ça fait longtemps que tu arpentes la galerie? »

« Ouais, longtemps. »

La réponse avait été prononcée sur un ton lugubre. Ambre n’avait aucune envie de s’attarder sur le temps que cette saleté de labyrinthe lui avait déjà fait perdre.

« Mais c’est parce que je veux à tout prix traverser la galerie. Si ton but, c’est juste de sortir de là, balade-toi au hasard et au bout de deux heures grand maximum, tu te retrouveras à ton point de départ. A condition de ne pas t’assommer avec un miroir entre temps, évidemment. » Précisa la rouquine avec un sourire qui se voulait vaguement réconfortant à la base, mais qui était devenu moqueur au fur et à mesure de la phrase.

« Moi c’est Ambre, et comme j’ai abandonné mon fil d’Ariane pour venir te voir, je vais me dépêcher d’aller le retrouver, okay ? »

Ambre fit deux pas dans la direction dont elle était arrivée, mais fût prise d’un élan de magnanimité qui la poussa à se retourner vers la fille aux cheveux rouges.

« Si jamais tu veux me suivre, ça ne me dérange pas. »

Sur ce, elle se concentra pour parcourir à l’inverse le chemin qu’elle avait emprunté à l’aller. Gauche, droite, gauche, gauche, gauche, dr… Ambre s’arrêta, interdite. Là où aurait dû se trouver une intersection permettant notamment de tourner à droite, elle venait de découvrir un cul-de-sac. Elle avait pourtant très soigneusement mémorisé les directions, elle n’avait quand-même pas pu se tromper sur un exercice aussi simplet, si ? Ambre ferma les yeux, sentant l’agacement la gagner à vitesse grand V. Avec ce dédale, tout était possible. Enfin, façon de parler. Parce que le traverser semblait plus s’approcher de l’impossible. Dans un accès de colère, elle  gratifia le miroir le plus proche d’un violent coup de pied.

« Cette galerie se paye ma tronche ! » brailla-t-elle.
Puis elle se rappela que la fille l’avait peut-être suivie, et donc qu’elle était peut-être en train de se donner en spectacle. Tant pis. Au moins, elle saurait à quoi s’attendre de sa part.

« Je crois que les miroirs bougent !! »

Le cri ne semblait pas émaner de bien loin, mais il était clair que Red ne l’avait pas suivie, ou s’était perdue en essayant de la suivre. Ambre soupira en entendant la remarque. Non pas parce que l’hypothèse était idiote, loin de là. Peut-être que les miroirs bougeaient, mais à vrai dire, ils n’en avaient même pas besoin. Après tout, aussi réaliste ce monde ai-t-il l’air, il restait parfaitement virtuel, et eux, simples citoyens lambdas, restaient à la merci du système et de ses fantaisies. Cette galerie n’avait d’autre but que de bloquer l’accès au reste de la tour. Rien n’indiquait qu’elle obéissait aux règles logiques et physiques en vigueur dans le reste d’Euphemia.

Ambre secoua la tête et s’efforça de ne pas sombrer dans le pessimisme. C’était un jeu, après tout. Et le principe d’un jeu, c’était qu’il y avait toujours une manière de gagner, aussi compliquée soit la méthode. Si le concepteur, ou plus vraisemblablement la conceptrice (Ambre se jura de lui dire deux mots sur cette arnaque le jour où elle rencontrerait la dirigeante de Hope Corporation) avait purement et simplement voulu bloquer l’accès à la tour, elle aurait imaginé une porte qu’elle seule pourrait ouvrir, ou un autre dispositif simpliste et imparable du genre, non ? A moins que cela l’amuse de voir des énergumènes dans son genre se débattre des heures durant avec son labyrinthe diaboliquement ingénieux.

« Possible » lâcha la rouquine d’une voix sonore, mais sur un ton dépourvu d’enthousiasme. « De toute façon, j’ai perdu le fil… »

Au sens propre du terme, évidemment, car le fil de ses pensées, elle le tenait solidement. Il fallait qu’elle essaye de dénicher plus de renseignements sur le dispositif. Qu’elle trouve d’autres personnes qui avaient déjà essayé de traverser le labyrinthe et qu’elle confronte leurs expériences à la sienne : peut-être des éléments lui avaient-ils échappé. Enfin, avant s’aventurer de nouveau dans le dédale, il fallait qu’elle se munisse d’un fil d’Ariane plus long et plus épais, de sorte à ce que si les miroirs se déplaçaient effectivement, il les empêche de se remettre en place totalement. Ambre hocha la tête pour elle-même. Elle n’abandonnait pas, loin de là. Elle prenait juste un peu de temps pour affiner sa stratégie.

« Je vais sortir de là, pour le moment. En marchant au pif, donc. On peut essayer de se rapprocher, si tu veux, mais c’est pas dit qu’on y arrive. »

Elle s’engagea dans un passage sur sa gauche, car il lui semblait que c’était de cette direction qu’était provenue la voix de la fille.

« Au fait, qu’est-ce que tu fais ici ? Il y a tout de même des endroits plus agréables pour se promener à Hope Corporation. »

Spoiler:

« Tu n'as pas tort! En arrivant en retard ce matin à la brasserie où je travaille, mon patron ne s'est pas résolu à me virer, il a préféré m'envoyer ici après mon service, autant dire qu'il a bien eu sa vengeance. »

« Quoi ??!! »

Son propre cri d’indignation empêcha Ambre d’entendre le son mat  caractéristique de la collision entre Red et un miroir, si bien qu’elle ne s’enquit pas de son état, ignorant que celle-ci venait de manquer de s’assommer.

« Ton patron t’a demandé de venir ici ? De quel droit ? Tu n’avais pas à lui obéir, enfin ! Qu’il te donne des ordres quand tu es au boulot, à la rigueur, mais en dehors… Et puis c’est quoi cette histoire de vengeance, on ne se venge pas de ses employés, merde !»

Ambre avait toujours eu un petit problème par rapport à l’autorité, de plus, son syndicaliste de père lui avait rebattu les oreilles avec les droits des travailleurs, le refus de l’intimidation au travail et tout un tas d’autres jolies valeurs dans le genre. Aussi la rouquine démarrait-elle au quart de tour dès qu’elle flairait le moindre malaise dans les rapports hiérarchiques au travail.

En l’occurrence, son imagination débordante voyait déjà la petite Red exploitée par un gros bonhomme tyrannique et désagréable. Elle se força à revenir à la réalité avant d’enchaîner sur des divagations à propos de l’article explosif qu’elle pourrait pondre face à une situation aussi scandaleuse. Ambre avait vaguement conscience que sa manie d’imaginer les pires situations, humainement parlant, avec un enthousiasme morbide à l’idée de l’exploitation journalistique qu’elle pourrait en faire était une forme dérangeante de déformation professionnelle.

« Dis, tu as un problème avec ton patron ? Non parce que s’il n’est pas correct, je peux aller lui remettre les pendules à l’heure ! Je suis journaliste, tu sais. Et puis j’ai un certain talent pour créer des scandales. En m’appliquant, je suis sûre que je peux détruire sa réputation et celle de sa brasserie en deux temps-trois mouvements. »

Il y avait une fierté certaine dans sa voix. Ambre n’avait honte de rien lorsqu’elle considérait la cause comme juste. Dans ce genre de situation, elle appliquait volontiers le proverbe Machiavélique : la fin justifiait les moyens.
Tout en parlant, elle continuait à se rapprocher du mieux qu'elle pouvait de la jeune fille.

« Mais attend, je croyais que les serveurs avaient tous été remplacés par des robots ? »

« Ne t'en fait pas pour ça, à mon retour demain matin je lui dirais ce que j'en pense au risque de me faire virer! »

Ambre approuva d’un vif hochement de tête, bien qu’elle soit consciente que Red ne pouvait pas la voir.

« Et puis maintenant que je sais que tu es capable de le faire fermer je n'ai plus vraiment peur du résultat que ça occasionnera. En fait je suis le gens de personne, qui quand elles veulent quelque chose, font tout pour. […] Et puis ce café n'est pas horrible en soit. En sortant d'ici je te donnerai l'adresse si tu veux, tu pourras constater par toi-même. »

Ambre écouta la tirade avec attention. Elle se fit la réflexion que c’était rassurant de savoir que les robots n’avaient pas encore totalement supplanté les humains dans un champ de travail qui rentrait tout de même, selon les classifications du monde réel, dans la catégorie des relations humaines. Elle-même n’était pas tout à fait à l’aise avec les drones qui pullulaient au sein de Hope Corporation. Bien sûr, elle appréciait comme tout le monde les services qu’ils rendaient et le confort de vie qu’ils procuraient. Elle les admirait même parfois pour le symbole qu’ils représentaient, celui de la puissance inégalable de la science. Mais elle avait vu suffisamment de films et lu suffisamment de romans d’anticipation pour qu’une petite partie de sa conscience s’inquiète de l’omniprésence de ceux qu’elle appelait sans réelle méchanceté les « tas de ferraille ». Bien sûr, il s’agissait d’un jeu partiellement conçu par la dirigeante de l’île. Personne ne maîtrisait mieux qu’elle toute cette technologie. La probabilité d’une révolte des robots, ou ce genre d’incidents qui nourrissaient les ouvrages de science-fiction était nulle. Ou presque…  Sans pouvoir le justifier rationnellement, Ambre avait le sentiment que cette technologie qui faisait la ferté et la puissance de Hope Corporation était à double tranchant. Mais peut-être était-ce son éternelle imagination trop fertile qui la faisait divaguer.

« Et toi? Pourquoi es-tu là? »

Ambre n’hésita pas, après tout, elle n’avait aucun intérêt à cacher ses motivations.

« Je veux entrer dans la tour. Découvrir ce qui y est caché. Et pourquoi pas y rencontrer la dirigeante ? »

Elle laissa échapper un petit rire à cette idée, qui n’était pas forcément très judicieuse, car elle ne pouvait pas savoir si Umbra ne la jetterait pas dehors grâce à un dispositif très perfectionné aussitôt qu’elle se serait aperçue de son intrusion.

« Le truc, c’est qu’il n’y a a priori pas d’autre moyen que de traverser cette galerie, ce qui n’est pas gagné. Mais j’y arriverai, tôt ou tard. Je ne suis pas du genre à laisser tomber un projet. »

Elle parlait avec une tranquille assurance que les gens confondaient souvent avec de l’arrogance. Sans doute Ambre était-elle arrogante, mais ce n’était pas dans ces moments qu’elle en donnait la preuve.

« Je viendrai à coup sûr faire un tour dans ta brasserie. Ne serait-ce que pour vérifier que tu y es toujours employée. Ton patron serait bien idiot de te virer, s’il existe encore des clients qui préfèrent être servis par toi, mais il ne m’a pas l’air d’être un cerveau, donc on ne sait jamais… En tous cas, s’il te vire, ne pars pas sans l’avoir figé pour au moins une demi-heure ! » Scanda-t-elle sur un ton féroce, en faisant allusion au don de Red, qu’elle avait perçu dès le premier regard qu’elle avait posé sur elle, et machinalement retenu.

« Tu connais mon don ? »

Ambre perçut l’habituelle pointe d’inquiétude dans l’habituelle question qu’on lui retournait invariablement  à chaque fois qu’elle révélait, plus ou moins volontairement, qu’elle connaissait effectivement leur don.
Elle ne comprenait pas ce qui leur faisait peur. C’était sans aucun doute un des pouvoirs les moins dangereux qui puisse exister. Et ce n’était pas comme si la majorité des gens dissimulaient jalousement leur pouvoir, bien au contraire. Posséder une capacité surnaturelle était pour beaucoup ce qu’il y avait de mieux dans ce jeux-prison, alors ils en usaient et abusaient. Quelle importance qu’elle devine au premier coup d’œil la nature de leur pouvoir puisque n’importe qui pouvait en faire de même lorsqu’ils se plaisaient à en faire la démonstration.

A la réflexion, peut-être que leur angoisse fugitive n’était dû qu’à une méprise. Peut-être que, en l’entendant énoncer un fait dont ils ne lui avaient jamais parlé, ils s’imaginaient qu’elle-même possédait un don terriblement intrusif. La lecture dans les pensées, ou une sorte de psychométrie qui lui donnerait accès à tous leurs souvenirs d’un simple effleurement. Des pouvoirs autrement plus puissants et potentiellement utiles que son petit don d’observation, mais dont Ambre n’aurait voulu pour rien au monde. Elle était curieuse, mais pas à ce point. Et Dieu sait quelles horreur on devait découvrir quotidiennement dans les pensées communes des citoyens, même les plus honnêtes.

Un pouvoir un poil plus offensif n’aurait en revanche pas déplu à la rouquine. Elle avait un talent inouï pour se mettre dans des situations invraisemblables et parfois légèrement dangereuses, il aurait donc été dans l’ordre des choses qu’elle obtienne un talent un tant soit peu utile pour se tirer de ce genre de bourbier. Mais non. Elle devait se contenter de faire des efforts d’ingéniosité et, bien souvent, de sprint pour s’en sortir. Pour cela, elle enviait un peu le don de Red. Pouvoir figer les gens ne serait-ce que quelques secondes lui permettrait de prendre aisément la poudre d’escampette lorsque les choses commençaient à tourner au vinaigre…

« ICI! »

Ambre sursauta.

« Hein ? Quoi ? »

Puis elle réfléchit deux secondes.
« Tu as trouvé la sortie, c’est ça ? »

La voix de Red lui était parvenue de la droite, aussi s’efforça-t-elle de se diriger au maximum dans cette direction.

« Okay, j’essaye de te rejoindre. »

Ce qui était plus facile à dire qu’à faire car tout le monde savait bien que dans un labyrinthe, on pouvait se trouver à deux mètres -à vol d’oiseau- de la sortie, et mettre encore trois heures et le double de kilomètres avant d’y parvenir effectivement. Fort heureusement, cela ne prit qu’une dizaine de minutes supplémentaires à la rouquine, temps qu’elle occupa à trottiner dans les couloirs de la galerie dans ce qu’elle supposait être la direction de la sortie, le tout en ponctuant régulièrement sa course de « ah ça y est je crois que j’y suiiiis…. ah non fausse alerte » ou encore « en tournant à droite, là, j’y serais probablement, mais le truc c’est qu’il n’y a pas de couloir vers la droite ».
Elle finit par émerger de la galerie, décoiffée (elle se promit d'arranger ça au plus vite) et un peu rouge d’avoir couru. Elle adressa un sourire rayonnant à Red qui avait eu la gentillesse de l’attendre pendant qu’elle se démenait.

« Je retournerais dans ce traquenard, mais dans quelques temps. Je ne veux pas voir de miroir pendant au moins une semaine ! » Dit-elle en riant, un peu jaune, cela dit.

Puis, elle considéra avec un peu plus de sérieux la jeune fille.

« Je devine le pouvoir des gens d’un simple coup d’œil, mais c’est tout. C’est pour ça que je connaissais le tien. Je dis ça parce que tu avais l’air inquiet… »

Ne sachant pas trop quoi ajouter –Ambre n’était pas très douée pour parler si elle n’avait pas quelque chose de précis à dire- elle farfouilla dans la sacoche qui ne la quittait jamais pour en sortir un petit carnet qui lui faisait office de répertoire. Elle mit dans les mains de Red, avec un stylo rouge en prime.

« Tu n’as qu’à écrire l’adresse de ta brasserie quelque part là-dedans. Vu la couleur, non seulement je ne pourrai pas le louper, mais en plus je n’aurai pas de mal à me souvenir qu’il s’agit de toi. »

Spoiler:

Le souffle qui voulait sortir de moi m'étouffait. Mes genoux tombèrent d'eux mêmes et je ne fie rien pour les en empêcher. Je voulais m'effondrer plus bas, m'allonger en étoile, sur le dos, face au soleil artificiel qui me brûlait les yeux artificiellement. Rien que pour faire signe de victoire à cette satanée galerie. Car c'était facile de parler quand on était à l'intérieur: c'est à dire au beau milieu du mystère, et dont la soif de curiosité se répandait dans nos membres comme un poison. Mais de retour à la réalité, là où le soleil éblouissait, tout s'effondrait. Ses élans de cœur ressemblaient, devant la lumière du jour, à de la simple et pure stupidité. Et cet endroit l'inspirait maintenant que de l'absurdité. Quand mon patron m'a dit d'aller à la galerie des miroirs, je ne peux maintenant m'empêcher de penser qu'il voulait en réalité dire "va te perdre". Car après m'être dépêtré ce labyrinthe tortueux il ne m'inspirait qu'un dégoût triste de rancœur. Comment Ambre avait-elle pu passer autant de temps là dedans avec une telle avidité de savoir. Étrangement je venais d'apprendre pour la première fois l'effet que l'on ressentait quand on nous a volé du temps. Et la première chose que je voulais crier, et c'était bien la seule, c'était "Saligaud, rends moi mon temps!", aurais je envie de crier d'un ton haineux.

« Hein ? Quoi ? Tu as trouvé la sortie, c’est ça ? »

Je lui lança un "OUI" dont je ne m'en croyais pas capable à cet instant.Les efforts qu'on faisait pour garder une voix nette et claire était bien plus colossaux que ceux auquel je m'étais attendue.

« Okay, j’essaye de te rejoindre. »

En dernière force, je voulais crier "OK" mais j'avais comme senti que celui ci s'était emmitouflé dans la chaleur sèche de ma gorge. Le souffle court, je pencha la tête et regarda le plafond. C'est comme si on en avait fini avec cette galerie. Seulement, je me souviens avoir juré d'y retourner. Je le regrette déjà.
Ambre disait à chaque minute qu'elle avait trouvé le chemin de la sortie, qui avait sûrement déjà changé. Mais parfois, sa voix me paraissait tellement lointaine, que je ne savais pas si c'était parce que si c'était moi ou si elle avait vraiment de faux espoirs.
Au bout de cinq minutes j'avais assez récupéré pour me remettre debout et m'appuyer juste après sur l'un des piliers de l'entrée.Je voulais paraître un minimum présentable.
J'avais commencé à rigoler des fausses alertes d'Ambre avec un rire qui ressemblait à celui d'une hyène avec le peu de voix que j'avais. Cette galerie était vraiment incroyable.
Au bout de pratiquement dix minutes je vis Ambre sortir au milieu des miroirs. Elle semblait épuisée et ses cheveux semblait n'en avoir fait qu'à leur tête(merci pour le jeu de mot merci).
J'aurais voulue l'aider, je me demandais si je lui avais ressembler en sortant à mon tour ou si c'était pire.

« Je retournerais dans ce traquenard, mais dans quelques temps. Je ne veux pas voir de miroir pendant au moins une semaine ! »

- Tu m'éton... Je me mis à tousser comme si je crachais l'air qui m'empêcher de parler correctement, Tu m'étonnes!

Je sentis son visage se refermer. Je m'étais un peu calmée en ayant attendue, mais ma question état toujours valide."Tu connais mon don?" je ne pense pas sincèrement que c'était de la peur, c'était bien plus ce sentiment d'intrusion. En fait, je me demandais pourquoi j'avais hérité de ce don en particulier. Il n'avais rien de bien utile dans la vie de tout les jours. Et puis comparé à ceux que j'avais déjà remarqué, il n'avait rien de bien original.

« Je devine le pouvoir des gens d’un simple coup d’œil, mais c’est tout. C’est pour ça que je connaissais le tien. Je dis ça parce que tu avais l’air inquiete… »

Je la regarda désemparée. Je m'en voulais un peu de m'être emportée. Son don avait le propre de faire vivre aux autres ce que j'avais vécu tout à l'heure. J'hocha la tête un peu déçu par moi même en dépit de ma réaction. Même si il faut avouer que ce n'était pas plus délicat de le balancer à quelqu'un en pleins milieu d'une conversation. Et oui, la mauvaise fois ne se paie pas. Je regarda Ambre sortir un stylo rouge vif et un petit carnet de sa sacoche. Elle me les tendit un peu nerveusement.

« Tu n’as qu’à écrire l’adresse de ta brasserie quelque part là-dedans. Vu la couleur, non seulement je ne pourrai pas le louper, mais en plus je n’aurai pas de mal à me souvenir qu’il s’agit de toi. »


Je souris et ouvris le carnet pour y marquer l'adresse puis le rentendit à Ambre.

- J'ai marqué aussi celle de mon appartement au cas où tu ne me croiserais pas pendant ta visite. On ne sait jamais.

Nous n'avions plus rien à ajouter. Je me tourna vers la galerie et la regarda de travers. Définitivement et simplement je me tourna vers Ambre pour lui dire au revoir.

- On se retrouve à la brasserie. Je commença à me gratter la tête comme à mon habitude quand j'étais gênée. Si tu as besoin de mon don même si il est très minime n'hésite pas.

Sur ce je repartie chez moi....épuisée.
Arrivée à mon appartement par téléportation je me dirigea instinctivement vers mon lit pour m'y affaler. "Patron, patron allez vous perdre vous aussi".

Spoiler: